Emmanuel Macron, la pensée perverse au pouvoir, par Johann Chapoutot

80e anniversaire de la Libération, Manouchian au Panthéon, trêve olympique : le Président use et abuse de ces célébrations pour imposer un récit néolibéral à mille lieues de la réalité politique et sociale vécue par les Français.

Le président Macron lors du 80e anniversaire des combats du plateau des Glières, célébré à Thônes (Haute-Savoie), le 7 avril 2024. (Frédéric Pétry/Hans Lucas. AFP)

par Johann Chapoutot, historien, professeur d’histoire contemporaine à Paris-Sorbonne

publié aujourd’hui à 7h07

A l’occasion des «Rendez-vous de l’histoire», qui se tiennent à Blois du 9 au 13 octobre 2024, les journalistes de Libération invitent une trentaine d’historiens pour porter un autre regard sur l’actualité. Retrouvez ce numéro spécial en kiosque jeudi 10 octobre et tous les articles de cette édition dans ce dossier.

On subodore que la cérémonite est symptomatique des pouvoirs faibles. En son temps, François Hollande avait usé et abusé du centenaire de la Grande Guerre pour faire oublier qu’il ne faisait rien, mais le champion du badinage mémoriel est son successeur, qui a tiré parti de toutes les ressources du calendrier pour bavarder çà et là, qui a vampirisé chaque mort comme il s’approprie chaque victoire (ou chaque défaite, le forçage papouilleux imposé à Kylian Mbappé au Qatar faisant foi).

On songe à ce bon mot par lequel les Allemands tentaient de s’accommoder de Guillaume II, empereur immature et brouillon, qui changeait d’uniforme deux fois par jour – il m’était revenu en mémoire au spectacle du jeune élu de 2017 qui, chaque jour, se grimait en sous-marinier, en joueur de l’OM, en pilote de chasse, vivant sa plus belle vie d’acteur de série B – , prenait la vie pour un théâtre et inquiétait l’Europe par son inconséquence : «A la chasse, il veut être le cerf, à chaque mariage, la mariée, à chaque enterrement, le mort.»

Provocation cynique, rapport psychotique au langage…

Les cérémonies du 80e anniversaire de la Libération du territoire français ont donné lieu à des laïus dont le contenu ne laissait d’étonner. Alors que de «trêve olympique» en «consultations» juridiquement baroques, l’on procrastinait pour ne pas respecter le résultat des élections, alors que, malgré la victoire du front républicain contre l’extrême droite, on héritait d’un gouvernement dirigé par le cinquième parti de l’Assemblée nationale, composé de ministres battus, le tout soutenu par le RN, on entendait distraitement des odes à la liberté, au suffrage, à la démocratie, réitérées, toute honte bue, devant le Conseil d’Etat ou l’Assemblée générale de l’ONU.

Provocation cynique, rapport psychotique au langage, ou expression d’une «pensée perverse», comme la définit précisément le sociologue Marc Joly dans un livre paru le mois dernier. La perversité au pouvoir c’est, plus que le mensonge permanent, une subversion complète des rapports entre le langage – considéré non comme une voie d’accès au réel et à l’autre, mais comme pur instrument domination – et la réalité – travestie, trahie, niée, car elle infirme à chaque instant les principes, les postulats et les raisonnements du locuteur.

Il faut nier avec constance le réel

En ce sens, la «pensée perverse» est peut-être bien le mode d’expression idoine du pouvoir en contexte néolibéral : comme la politique du gouvernement va contre les intérêts de l’écrasante majorité des citoyens et, au-delà, du vivant dans son ensemble, il faut mentir en permanence, jusqu’à ne plus savoir où l’on en est du réel ni ce que l’on dit. Pire, comme la politique néolibérale est un échec (le désastre macronien, des 1 000 milliards d’euros de dette supplémentaires en sept ans au discrédit universel de la France sur la scène internationale, en passant par l’affaissement économique et la destruction opiniâtre des services publics, source de misère massive, de rancœurs sans fin et de déclassement d’un pays qui dévisse, en est un exemple paradigmatique), il faut nier avec constance le réel et détruire jusqu’au sens des mots.

C’est donc avec «bienveillance» et «respect» que l’on va détruire le droit du travail et rendre la vie de millions de citoyens impossible ; c’est par «esprit de responsabilité» que l’on va gouverner avec le RN au mépris de tous les contrats électoraux passés avec les Français depuis 2017 ; c’est parce que l’on incarne le «camp de la raison» que l’on va construire l’A 69, agrandir les aéroports, organiser les jeux d’hiver de 2030 et placer au ministère de l’Ecologie, couronnement d’une étonnante procession de nullités, une amatrice de forçages pétroliers (forages forceurs de puits en fin de vie).

La manifestation d’un phénomène d’individus sans mémoire ni principe

Emmanuel Macron n’est que la manifestation d’un phénomène plus large qui a pour noms, depuis les années 90, Berlusconi, Nétanyahou, Bolsonaro, Trump, Boris Johnson – soit des individus sans mémoire ni principe, qui sont prêts à dire absolument n’importe quoi et à faire absolument tout pour conserver un pouvoir qu’ils ont généralement beaucoup de mal à rendre. Ils ont beau faire quelques génuflexions réglementaires devant la «démocratie» (ou la «République»), on constate surtout leur dilection pour les putschs (6 janvier 2021 à Washington, 8 janvier 2023 à Brasília), à nier le résultat des élections ou à ne pas en tenir compte (France), à détruire l’Etat de droit en minant la justice et la Cour suprême (Israël), à corrompre, tricher et voler (Berlusconi, mais aussi en France, où l’Elysée a juré la perte d’Anticor…).

C’est là que l’on revient aux commémorations : la pensée perverse y trouve matière à faire un «événement» et à mettre en scène des «éléments de langage», sans qu’aucune réflexion sérieuse ne soit consacrée à la date commémorée : on sait que les gaullistes (honneur à eux, quand on les entend aujourd’hui), les communistes, Missak Manouchian et tant d’autres se sont battus contre la corruption (de la presse et du pouvoir), le libéralisme économique (qui avait mené au désastre de la crise de 1920, de la dépression et du fascisme), et un pouvoir solitaire, inepte et gâteux (celui de Pétain et de ceux qui, aujourd’hui encore, persistent à lui rendre hommage).

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Festi’prev

Edition 2024

Des goûts de soi, film des collégiens du collège Françoise Dolto

Pour en savoir plus :


Edition 2023

La lettre, film des collégiens du collège Françoise Dolto

Du 11 au 13 mai 2023, se tenait à La Rochelle le festival international du film de prévention, citoyenneté et jeunesse.

Le festival est organisé par la Communauté d’agglomération de La Rochelle et l’association Angoul’Loisirs. Il a pour objectif de valoriser les créations faites par les jeunes dans les thématiques de la prévention et de la citoyenneté.

Les films sélectionnés pour le festival sont des courts-métrages de fiction, documentaires ou d’animation. Ils doivent traiter de thèmes tels que la santé, l’environnement, la sécurité, l’égalité, l’inclusion sociale, etc.

Ces courts-métrages sont généralement réalisés par des collégiens, et c’est à ce titre qu’avec l’association PAPJ, j’ai intervenu en fin de projet pour aider les collégiens du Collège Françoise Dolto de La Jarrie à préparer la présentation de leur court-métrage.

Il s’agit d’un exercice difficile. En effet, les élèves, lors de la projection de leur film au festival, doivent en faire une présentation devant un public de plusieurs centaines de personnes, ainsi que répondre à des questions sur la radio locale « Radio Collège 95.9 ».

Mon intervention a permis aux élèves d’acquérir les compétences nécessaires pour préparer une présentation et de renforcer leur communication orale. Ces compétences seront précieuses lors de leurs futures présentations orales, telles que l’épreuve d’histoire des arts du brevet des collèges.

Les élèves m’ont d’ailleurs remercié lors de leur interview sur les ondes de Radio Collège.

Pour en savoir plus :

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Les rêves de Pierrette

Je suis fier de vous présenter mon projet de film intitulé « Le rêve de Pierrette », réalisé dans le cadre de mon option cinématographie en sociologie et anthropologie. Ce film explore la thématique du rêve à travers l’interview de ma grand-mère Pierrette, une personne de confiance qui partage ses souvenirs et ses expériences de rêves.

La réalisation de ce film a été une expérience instructive pour moi. J’ai commencé le projet en définissant une structure pour le film, l’écriture d’un scénario. Ensuite, j’ai mené cet interview qui a permis à Pierrette de raconter des souvenirs de rêves marquants, des réflexions sur le sens du rêve dans sa vie, ainsi que sur les croyances et les traditions qui l’entourent. Et pour finir j’ai réalisé le montage de l’interview pour ce rendu final.

Ce film « Le rêve de Pierrette » a été diffusé aux cinémas Studio de Tours, après avoir été sélectionné par l’université de Tours. Cela a été une expérience incroyablement enrichissante pour moi en tant que cinéaste et en tant que personne, et je suis ravie aujourd’hui de vous le proposer pour la visualisation en ligne.

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« Faites du soleil en hiver »

En tant qu’animatrice socio-culturelle au sein du centre social Lab’O des Possibles, j’ai travaillé avec d’autres partenaires pour la réussite de la fête de fin d’année « Faites du soleil en hiver » qui s’est tenue le mercredi 14 décembre à l’Agora. Cette fête a été organisée dans un esprit de partage, de convivialité et de solidarité, dans le but de rassembler les habitants autour d’ateliers variés.

J’ai eu l’opportunité de réaliser différents ateliers qui ont contribué à la richesse du programme de l’événement. J’ai notamment proposé un atelier de création de lampions pour les enfants, qui ont adoré participer et qui ont pu repartir avec leur propre création lumineuse. J’ai également organisé un atelier de réalisation de cartes de vœux, où les participants ont pu exprimer leur créativité tout en souhaitant de bonnes fêtes de fin d’année à leurs proches.

Ces ateliers ont permis aux participants de développer leur imagination et leur sensibilité artistique tout en favorisant les rencontres intergénérationnelles. Les habitants ont ainsi pu passer un moment agréable en famille ou entre amis, tout en renforçant les liens entre les différentes générations.

En somme, les ateliers réalisés dans le cadre de cette fête de fin d’année ont contribué à la réussite de l’événement en permettant aux habitants de se retrouver et de partager des moments de convivialité. Cette expérience a été pour moi une belle occasion de contribuer à la création de liens sociaux et à la promotion des valeurs de solidarité et de partage qui sont chères au centre social Lab’O des Possibles.

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